La fin des études approchait, les questions charnières de quoi faire, et où aller une fois mon diplôme en poche se faisaient plus insistantes.

Je me souviens d'un article que j'avais lu, il y a très longtemps alors que je n'étais pas encore majeur, c'était un article sur le top des villes où il y faisait bon vivre, et Strasbourg y figurait en pôle position. L'article était agrémenté de quelques photos de la petite France (l'un des quartiers les plus touristiques), et vantait les louanges de la ville, caractérisant Strasbourg de capitale européenne et capitale du vélo. Je crois que mon attrait pour Strasbourg commença à ce moment-là.

Mais avant de m'engager dans l'aventure Alsacienne, je souhaitais me faire ma propre opinion. J'avais 1 semaine de vacances, un vélo et quelques contacts sur place, il n'en fallait pas plus pour définir mon projet : Partir de Nancy en vélo et visiter Strasbourg, pour voir si j'arriverais à envisager mon avenir là bas. C'était mon premier road trip en vélo, et les prémisses d'une passion pour le voyage.

Mon itinéraire était prêt depuis plusieurs semaines, le matériel empaqueté dans les sacs, je m'étais levé tôt ce matin pour le jour du grand départ. Mais dès les premiers coups de pédale, je rencontre quelques problèmes de réglages, les sacoches frottent sur la roue arrière et le guidon hoche dans tous les sens. Je décale les sacs, mais impossible de régler ce problème de guidon sans remonter chez moi et tout démonter. Une fois le guidon enlevé, le verdict est amer, le collier à bile est écrasé à certains endroits et doit être changé, va savoir quand c'est arrivé ! L'envie d'abandonner mon voyage s'installe. Après un moment de réflexion, je me rends au Décathlon qui possède miraculeusement une dernière pièce de rechange, puis je rentre chez moi la pièce en main. Lorsque je remonte à nouveau sur mon vélo, il est déjà 15h, et tout le programme que je me m'étais donné et chamboulé, un moment de réflexion s'impose. Si je m'arrête là plutôt que là… ou si je pars demain… sinon si je passe par là… Aller si je n'y vais pas maintenant, je ne le ferrai jamais, je pars et on verra en cours de route. Mine de rien, c'est une mentalité que je garderai pour la plupart de mes autres voyages, « Allons-y, on verra le reste sur place »

Les premiers kilomètres s'enchaînent rapidement, je parcours les rues de Nancy que je connais déjà, puis je quitte la ville et prends déjà quelques libertés sur l'itinéraire, et partant dans la mauvaise direction, je reviens à deux reprises sur mes pas (enfin sur mes roues, je ne sais pas comment on doit dire). Dans toute cette agitation, j'en ai oublié de manger, je m'arrête sur une petite table pour un premier repas à l'ambiance bucolique. J'arrive à Saint Nicolas de Port, ma première étape. La ville possède un musée du cinéma et un musée de la brasserie, mais pas le temps pour ça, et de toute manière je n'ose pas trop laisser mon vélo sans surveillance trop longtemps.Je m'arrête juste pour visiter la basilique que je parcours en 4e vitesse, pour retourner à mon vélo au plus vite.

La deuxième étape de mon voyage se fait à Lunéville, là où j'aurais dû normalement déjeuner… Je n'étais jamais allé à Lunéville malgré 4 ans passés en Lorraine, les rayons du soleil accrochent les façades du château de Lunéville me rappelant qu'il ne me reste plus que quelques heures avant le coucher du soleil. En traversant les jardins, un gamin me dit « Bonjour » et regarde mon vélo et ses sacoches de ses yeux tout ronds. Lui même est sur un vélo en plastique poussé par une grande tige par ses parents. Je discute un peu avec eux et sont impressionnés par le voyage que j'entreprends, mais pas le quoi d'être ébahis pour l'instant, je n'ai parcouru qu'une 30aine de km.

Je sors de la ville et pédale jusqu'à ne plus voir clair, un lièvre traverse le chemin et manque de me renverser. Un peu plus loin des yeux rodent dans la nuit. Mon périple m'amène à Saint Clément, bien avant là où j'aurais dû arriver, mais je suis à bout de force, je me pose à l'extrémité ouest du village, perdu entre la forêt, les champs et les habitations, je monte rapidement la tente pour m'y réfugier à l'intérieur, je suis exténué, j'ai mal partout, ma peau est rêche de sueur séchée. La nuit qui suit est rude, le vent siffle, alors que d'autres cris qui me sont inconnus résonnent dans le noir, le sommeil se fait par intermittence, le froid s'insinue dans la tente et je me réveille frissonnant. De mauvais esprits tournent autour de la tente, guettant une sortie de ma part, tel le monstre caché sous le lit, qui ne s'en prend qu'aux doigts de pied qui dépassent de la couette.

Campement de fortune